Chapitre 2

Le soleil se leva sur le château, trouvant les Hobbits et Aragorn endormis. Frodon ouvrit les yeux et sourit faiblement en voyant Sam allongé près de lui. Il tourna la tête et contempla quelques minutes son ami humain qui reposait dans un fauteuil. Aragorn s'éveilla alors et ils échangèrent un regard rempli de souffrance et d'amitié. Le Roi se leva et s'approcha du lit, essayant de ne pas réveiller Sam.

- Comment vous sentez-vous ?

- Mal… J'ai mal…

- Je sais…

Il était désespéré de ne rien pouvoir faire pour l'aider.

- Gandalf…

- J'ai envoyé un messager à sa recherche, mais je crains qu'il ait du mal à retrouver notre ami. En revanche, il devrait nous envoyer Legolas rapidement.

- Cela ne servira à rien… Il est trop tard…

- Non !

Ils sursautèrent, surpris par la voix de Sam qu'ils croyaient endormi.

- Vous allez vous en sortir ! Il le faut !

Devant tant de fougue, Aragorn se prit à espérer que le Hobbit dise vrai et que l'un de leurs amis serait en mesure de sauver Frodon du mal qui le rongeait.

Aragorn laissa Frodon et Sam seuls le temps d'aller leur chercher à manger. Il tomba sur Merry et Pippin qui cherchaient les cuisines.

- Venez avec moi.

En voyant la taille de la pièce dans laquelle s'activaient trois cuisiniers, les Hobbits s'extasièrent.

- C'est magnifique !

- C'est grandiose !

- Ce n'est qu'une cuisine, leur répondit le Roi en souriant.

Il leur fit signe de s'installer à une petite table qui semblait les attendre et donna ses ordres aux cuisiniers pour que les Hobbits puissent manger tout ce qu'il désiraient. Puis, il prit un plateau pour Sam et Frodon, et l'emmena.

Avant même d'entrer à nouveau dans la chambre, Aragorn entendit une voix familière qui fit bondir son cœur dans sa poitrine. Il entra vivement et sourit en reconnaissant la silhouette fine et élancée qui se tenait près du lit.

- Legolas !

L'Elfe se retourna et son regard rencontra celui du Roi.

- Aragorn…

Le souverain posa le plateau sur une table et s'approcha de son ami.

- Je suis heureux de te revoir, Estel.

Aragorn ne répondit pas et serra l'Elfe dans ses bras. Celui-ci hésita quelques secondes avant de lui rendre son étreinte. Lorsque le Roi le relâcha, Legolas sentit une pointe de regret envahir son cœur.

- Comment se peut-il…

- Que je sois déjà ici ? C'est simple. Je m'ennuyais dans les bois, alors j'ai voulu rendre visite à nos amis les Hobbits. Quand je suis arrivé dans la Comté, on m'a appris que ceux que je désirais voir étaient partis en direction du Gondor. Et, me voilà !

- Tu arrives vraiment à point nommé.

- Je l'ai vu.

Legolas se tourna vers Sam qui le regardait avec inquiétude. Frodon dormait, mais semblait avoir encore perdu des forces. L'Elfe soupira.

- Je ne sais pas si je pourrais le sauver. Je n'ai ni la puissance, ni la sagesse d'Elrond. Mais, je vais faire de mon mieux. Si seulement Gandalf était là…

- Je l'ai envoyé quérir, mais je ne pense pas qu'il pourra être ici avant plusieurs jours. Faut-il encore que mon messager le trouve.

- Je vais avoir besoin de quelques ingrédients pour préparer une potion qui soulagera la douleur. Ce sont des plantes que je devrais pouvoir trouver dans les environs.

- Je t'accompagne, proposa Aragorn.

Legolas répondit d'un sourire et ils sortirent de la chambre.

Legolas et Aragorn marchaient dans les bois en silence, plongés tous deux dans leurs pensées. Alors que l'Elfe ramassait des plantes pour la potion, il se rendit compte que son compagnon ne le suivait plus. Il fit demi-tour et ne tarda pas à retrouver le Roi, assit contre un arbre, les yeux clos. En entendant le pas léger de son ami, Aragorn ouvrit les yeux et l'Elfe put y lire une tristesse infinie. Des larmes menaçaient de couler sur les joues de l'Homme et, lorsqu'elles s'échappèrent enfin de ses yeux, il ne fit aucun geste pour les essuyer. Legolas s'agenouilla devant son ami et posa une main réconfortante sur son bras.

- Tout ira bien, Aragorn.

Il avait pris une voix qu'il pensait rassurante, bien qu'il soit loin d'être lui-même convaincu de ses paroles.

- Je… je ne supporterai pas de le perdre… pas lui… pas après tout ce qu'il a fait pour moi…

- Je comprends.

L'Homme leva un regard brouillé par les larmes vers l'Elfe et soupira :

- Non, tu ne comprends pas… Tu ne sais pas… Elle…

Il s'arrêta, incapable d'en dire plus. Legolas comprit de qui il parlait et l'encouragea à soulager son cœur.

- Parle, mon ami. Je suis là pour t'écouter.

- Elle… Arwen… Personne ne sait comment elle est morte, pas même Elrond…

Il passa une main sur son visage, hésitant à continuer. Mais, la présence de Legolas à ses cotés le réconfortais et il savait qu'il n'aurait pas d'autre occasion de tout lui dire.

- Arwen attendait un enfant… Un garçon… Elle… est morte en le mettant au monde…

Legolas ne dit rien. Seuls ses yeux trahissaient sa compassion pour la douleur de son ami.

- L'enfant… n'a pas survécu… J'ai cru mourir… J'ai failli mourir… Je suis tombé malade… Je ne voulais pas me battre contre la maladie, puisque je n'avais plus rien… J'ai demandé à tout le monde de garder le secret… Je ne voulais pas que Gandalf, ou toi, vienne m'aider… Je ne voulais que mourir…

L'Elfe s'assit sur le sol, tout près de son ami et demanda d'une voix bouleversée par l'émotion :

- Qu'est-il arrivé ?

- J'ai reçu une visite. Celle de Frodon et de Sam. Au début, je ne voulais pas les voir et je leur fis dire que j'étais parti en voyage avec Arwen. Ils restèrent plusieurs jours au château sans savoir que j'étais juste à côté d'eux. Mais je n'avais pas compté avec la perspicacité des Hobbits et ils découvrirent rapidement que je n'étais pas parti. Ils apprirent la vérité au sujet d'Arwen et Frodon se débrouilla pour venir me voir. Je voulus le rejeter, mais je n'en avais même plus la force… Je m'en souviens comme si c'était hier alors que ça se déroulait voici deux ans. Frodon monta sur mon lit et s'assit près de moi. Et, il me parla. Il me raconta tout ce qui lui était arrivé depuis que l'anneau avait été détruit. Il me parla de Merry, Pippin, Gandalf, Gimli et de toi. Il me demanda des nouvelles de Faramir et d'Eowyn. Comme je refusais de lui répondre, il s'emporta et me demanda pourquoi je voulais mourir. Je lui expliquais alors que je n'avais plus personne au monde. Et, il me répondit : "Si vous le croyez vraiment, alors je ne vois pas ce que je fais ici. Après tout ce que nous avons traversé ensemble, vous osez encore dire que vous n'avez pas d'amis !". J'essayais de l'interrompre, mais il m'en empêcha. "Vous n'êtes qu'un égoïste, Roi Elessar ! Vous ne méritez pas d'avoir des amis tels que Gandalf, Gimli ou alors Legolas. Vous ne méritez pas tout ce que ces personnes et d'autres ont fait pour vous ! Vous avez la mémoire courte. Adieu !". Et il sortit de la chambre avant que j'ai pu dire un mot de plus. Grâce à ces paroles, mon esprit était enfin sorti des brumes qui l'entourait et je pris conscience de la chance que j'avais. J'appelais alors une servante pour qu'elle m'aide à me lever et je rejoignis Frodon et Sam qui s'apprêtaient à repartir dans la Comté. Je leur fis mes excuse et les invitaient à rester encore quelques temps. Ce jour-là, Frodon me sauva la vie et…

Les larmes ruisselaient à nouveau sur ses joues. Legolas passa un bras autour de ses épaules et l'attira contre lui. Aragorn ne laissa faire, se blottissant des les bras de son ami pour laisser sortir sa peine. Ils restèrent ainsi quelques minutes, jusqu'à ce qu'Aragorn repousse doucement l'Elfe, tout en évitant soigneusement de croiser son regard.

- On devrait chercher les plantes dont tu as besoin pour la potion.

- Bonne idée.

Legolas se leva et tendit la main pour aider son ami à faire de même. Le regard que lui lança le Roi à cet instant le fit frissonner. Il garda la main d'Aragorn dans la sienne quelques minutes de plus que cela était nécessaire. Puis, il repartit à la recherche des plantes. Mais, il ne pouvait empêcher son cœur de battre plus vite à la pensée des sentiments qu'il avait lus dans le regard de son ami. Je ne dois pas avoir de telles pensées en ce moment, se morigéna t'il. Je dois me concentrer sur la guérison de Frodon. Après… Il fut interrompu dans ses réflexions par la voix d'Aragorn.

- A quoi penses-tu, Legolas ?

L'Elfe s'empourpra et fit en sorte de tourner le dos à l'Homme pour qu'il ne remarque pas son trouble.

- A la composition de la potion, mentit-il.

Aragorn savait que son ami lui cachait la vérité, mais cela lui importait peu pour le moment. Tout ce qui comptait, c'était de sauver le Hobbit. Il serait toujours temps plus tard d'approfondir le sujet. Ils finirent par trouver les plantes et retournèrent au château.